Du 20 au 22 octobre 2025, Yamoussoukro a accueilli l’atelier de pré-validation de la Stratégie nationale de digitalisation de l’éducation (SNDECI 2024-2028). Au-delà de l’ambition technologique, c’est un exercice de management stratégique d’envergure qui se dessine : piloter la transformation digitale d’un système éducatif national avec ses infrastructures, ses ressources humaines et ses contraintes budgétaires.
Une stratégie structurée autour de trois axes
Le ministère de l’Éducation nationale et de l’Alphabétisation, via sa direction des technologies et systèmes d’information (DTSI), a défini un cadre stratégique articulé autour de trois piliers majeurs. Premier axe : garantir un accès équitable des apprenants aux ressources et compétences numériques. Deuxième axe : doter les enseignants et l’encadrement des outils numériques nécessaires. Troisième axe : établir une gouvernance digitale du système éducatif permettant la collecte de données et un pilotage numérique efficace.
Cette approche structurée reflète une volonté de dépasser la simple acquisition de matériel pour construire un écosystème cohérent. L’atelier de Yamoussoukro, qui a réuni représentants du MENA, experts nationaux et internationaux, ainsi que des partenaires comme l’Organisation internationale de la Francophonie, visait justement à lancer l’étude de référence nécessaire à la mise en œuvre.
Les défis du management du changement
Les lacunes identifiées lors de l’atelier dessinent les contours d’un défi managérial complexe. L’insuffisance d’infrastructures – connectivité et matériel informatique – constitue un obstacle technique mais aussi financier. Les compétences numériques limitées chez certains enseignants nécessitent un programme massif de formation continue.
Le risque d’aggraver les inégalités territoriales entre zones urbaines et rurales appelle une stratégie d’inclusion délibérée. Enfin, le financement, estimé à plusieurs centaines de milliards de FCFA, reste partiellement incertain et requiert la mobilisation de partenariats public-privé et l’appui de bailleurs internationaux.
Les leçons des expériences africaines
L’expérience rwandaise offre des enseignements précieux. Le Rwanda a lancé une stratégie nationale de digitalisation de l’éducation et de la formation technique avec le soutien de l’UNESCO, démontrant qu’une impulsion politique forte combinée à une feuille de route claire permet d’avancer rapidement.
Au Ghana, une étude a révélé que la simple possession d’outils numériques ne suffit pas : l’usage effectif par les enseignants et l’accès réel des élèves s’avèrent déterminants. Ce constat souligne l’importance de la dimension humaine dans toute transformation digitale. Pour la Côte d’Ivoire, le message est clair : infrastructure, formation et pilotage doivent progresser de concert pour éviter que les équipements restent inutilisés.
Gouvernance et pilotage de la performance
La SNDECI prévoit une collecte de données de référence, des indicateurs clairs et un suivi régulier – autant d’éléments caractéristiques d’une approche moderne de gestion de projet. Cette rigueur méthodologique contraste avec les déploiements technologiques improvisés qui caractérisent parfois les projets publics africains.
Le rôle des startups EdTech mérite également attention. Le secteur privé peut apporter des plateformes d’apprentissage, des contenus adaptés aux réalités ivoiriennes et des solutions innovantes face aux contraintes de connectivité. Favoriser l’émergence d’un écosystème EdTech local permettrait d’adapter les solutions plutôt que d’importer des modèles inadaptés.
Les facteurs critiques de succès
La réussite de cette transformation repose sur plusieurs facteurs. Un plan d’action tangible avec échéances claires et ressources mobilisées doit structurer le déploiement. L’inclusion des zones rurales et des écoles défavorisées conditionne l’équité du système. L’investissement massif dans la formation des enseignants et l’accompagnement des apprenants s’impose comme priorité absolue.
Le pilotage rigoureux via une collecte de données fiable et un suivi transparent permettra d’ajuster la stratégie en temps réel. Les risques à surveiller incluent la dépendance technologique, la maintenance des équipements et la résistance au changement dans certaines structures.
Pour les managers du secteur public ivoirien, la SNDECI constitue un cas d’école : comment piloter une transformation digitale d’envergure avec des ressources limitées, des parties prenantes multiples et un impératif d’équité. Un défi managérial qui, s’il est relevé avec succès, positionnera la Côte d’Ivoire comme référence régionale en matière de modernisation des services publics.
En savoir plus sur businessechos.net
Subscribe to get the latest posts sent to your email.









