SACO : 60 ans au service de l’industrialisation du cacao ivoirien

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En franchissant le cap symbolique de ses 60 ans d’existence, la Société Africaine de Cacao (SACO) confirme sa position de leader dans la transformation du cacao ivoirien. Premier broyeur du pays avec une capacité dépassant 230 000 tonnes annuelles, cette filiale de Barry Callebaut vient de franchir une nouvelle étape stratégique en lançant sa propre chocolaterie. Portrait d’un acteur industriel clé qui conjugue performance économique, engagement social et transition écologique au cœur de la première nation cacaoyère mondiale.

Un géant discret de l’industrie cacaoyère

La Société Africaine de Cacao (SACO), filiale ivoirienne du groupe suisse Barry Callebaut, s’est imposée comme un acteur incontournable de la transformation du cacao en Côte d’Ivoire depuis sa création en 1964. Régulièrement qualifiée de “fleuron de l’industrie du cacao dans notre pays” par les autorités ivoiriennes, cette entreprise sexagénaire a marqué l’histoire économique nationale.

L’année 2024 a été particulièrement symbolique pour SACO qui, pour son soixantième anniversaire, a inauguré sa première unité de chocolaterie baptisée “Chocodaga”. Cette initiative marque un tournant stratégique vers la production de produits finis à plus forte valeur ajoutée.

Des capacités industrielles impressionnantes

SACO exploite principalement deux grandes usines de transformation du cacao situées à Abidjan et San-Pédro. Ces installations produisent de la pâte (liquide) de cacao, du beurre de cacao, de la poudre et des tourteaux (résidus de broyage).

Grâce à d’importants investissements récents, ses usines peuvent désormais broyer plus de 230 000 tonnes de fèves par an (contre environ 120 000 tonnes avant 2019), ce qui positionne SACO comme le premier transformateur de cacao de Côte d’Ivoire.

Ces performances industrielles sont le fruit d’un vaste programme d’investissement de 30 milliards FCFA déployé entre 2018 et 2022, qui a permis d’augmenter les capacités de production de l’entreprise de 40%.

Des résultats financiers solides

Sur le plan économique, bien que le groupe ne publie pas séparément les résultats de sa filiale ivoirienne, des sources locales indiquent que SACO a généré environ 296,6 milliards FCFA de chiffre d’affaires en 2019 (soit environ 452 millions d’euros), pour un bénéfice net de 2,2 milliards FCFA. Ce chiffre d’affaires est de loin le plus élevé parmi les transformateurs ivoiriens, devançant largement Cargill qui affichait 135 milliards FCFA la même année.

Cette performance remarquable s’appuie sur des capacités industrielles considérables : la capacité combinée du groupe Barry Callebaut en Côte d’Ivoire (SACO + activités de négoce) dépasse 215 000 tonnes par an depuis 2018, plaçant l’entreprise loin devant ses concurrents directs.

Un engagement pour une filière durable

SACO/Barry Callebaut déploie de nombreux programmes pour accompagner les producteurs et répondre aux exigences de durabilité. Dans le cadre du projet Cocoa Horizons lancé par le groupe en 2010, l’entreprise a versé des primes RSE significatives : un communiqué indique par exemple qu’elle a redistribué 2,8 millions de francs suisses (environ 1,7 milliard FCFA) en 2012 à 45 coopératives et 12 000 planteurs pour du cacao certifié Rainforest Alliance.

Ces milliers de producteurs ont également bénéficié de formations aux pratiques agricoles durables (taille, fertilisation, etc.) dispensées par l’équipe de certification interne de SACO en Côte d’Ivoire.

Au-delà des aspects purement agricoles, l’entreprise mène aussi des actions communautaires. Par exemple, SACO a coordonné la construction d’une école primaire à Abokro, dans le sud-ouest du pays, en partenariat avec Hershey et un syndicat local, dans le cadre d’un projet intégrant formation agricole, accès à l’éducation, à l’eau potable et aux soins de santé.

La transition écologique au cœur de la stratégie

Sur le plan environnemental, Barry Callebaut, et donc SACO, se sont engagés publiquement sur la préservation des forêts et la réduction des émissions. Le groupe s’est fixé l’objectif ambitieux d’être “forest positive” d’ici 2025 et neutre en carbone d’ici 2050.

Sur le terrain, ces engagements se traduisent par des programmes d’agroforesterie, avec l’introduction d’arbres d’ombrage sur les plantations, et par un renforcement de la traçabilité des fèves pour garantir l’absence de déforestation illégale. La réglementation européenne EUDR (produits sans déforestation, entrée en vigueur fin 2024) a encore renforcé ces exigences : Barry Callebaut affirme aligner sa stratégie sur ces objectifs de lutte contre la déforestation, de réduction des gaz à effet de serre et de préservation de la biodiversité.

Des défis à relever

Malgré ces succès, SACO fait face à plusieurs défis majeurs. D’une part, la transition vers une production durable l’oblige à aider les planteurs à faire face au changement climatique (rendements en baisse, maladies) et à réduire son empreinte écologique, tout en maintenant sa compétitivité. D’autre part, l’industrialisation locale – cadre ambitieux fixé par le gouvernement qui vise à atteindre 50% de transformation locale – nécessite de doubler la capacité nationale, un objectif pour lequel SACO représente un levier majeur grâce à ses récentes expansions.

L’entreprise doit également intégrer l’impact des nouvelles réglementations comme l’EUDR qui imposent davantage de traçabilité et d’assurance durable sur les chaînes d’approvisionnement. Pour y répondre, Barry Callebaut a mis en place des outils de diligence raisonnée.

Un avenir prometteur mais exigeant

Le rôle de SACO vis-à-vis des coopératives reste crucial : historiquement, Barry Callebaut achète les fèves via un vaste réseau de coopératives. Aujourd’hui, l’entreprise doit continuer à soutenir ces groupements (formations, accès au crédit, primes) pour sécuriser son approvisionnement tout en veillant à ce que les valeurs ajoutées du cacao profitent aussi aux producteurs. La multiplication des partenariats, comme la Coop Academy développée avec IDH et Cargill, illustre cette approche coopérative.

Les défis consistent donc à équilibrer l’efficacité industrielle et l’intégration sociale : tout en augmentant ses capacités, SACO doit garantir l’équité vis-à-vis des planteurs et répondre à la pression internationale sur la durabilité.

Un levier majeur pour la filière ivoirienne

Au final, SACO apparaît clairement comme un levier industriel majeur pour la Côte d’Ivoire. Sa forte présence dans les capacités de broyage, son soutien aux politiques publiques de transformation, et son ancrage dans des programmes de durabilité lui donnent les atouts nécessaires pour faire progresser la filière. Par ses investissements et sa nouvelle filiale de chocolaterie, elle contribue à augmenter localement la valeur ajoutée du cacao.

Cependant, ce leadership dans le broyage ne garantit pas à lui seul une meilleure répartition de la richesse : comme le note le gouvernement, la Côte d’Ivoire ne capte encore qu’environ 6% de la valeur mondiale du cacao. Pour que SACO soit un véritable catalyseur de développement, il faudra que ses actions s’inscrivent dans un cadre plus large – réglementations fortes sur la traçabilité et le travail des enfants, soutien continu aux coopératives, et renforcement de la transformation locale – afin de transformer ce fleuron industriel en un moteur durable de prospérité partagée.

Dans un pays qui produit près de 40% du cacao mondial mais qui n’en capture qu’une infime partie de la valeur, l’exemple de SACO montre qu’une industrialisation intelligente et responsable peut créer un cercle vertueux bénéficiant à l’ensemble des acteurs de la filière. L’avenir dira si ce modèle peut véritablement transformer l’or brun en or pour tous les Ivoiriens.


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