George Elombi : l’homme qui doit porter Afreximbank à 250 milliards de dollars

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Nommé à la présidence d’Afreximbank en 2025, George Elombi incarne la continuité au service de la transformation. Après trois décennies au sein de l’institution, ce juriste discret hérite d’une banque en pleine expansion, mais confrontée à des défis de gouvernance et de financement. Son mandat sera déterminant pour l’avenir du commerce intra-africain.


À 55 ans, George Elombi n’est pas un inconnu dans le paysage financier panafricain. Pourtant, sa nomination à la tête de la Banque africaine d’import-export (Afreximbank) marque un tournant stratégique pour cette institution qui s’est imposée comme le principal levier du financement du commerce sur le continent. Dans un contexte marqué par la dégradation récente de la note de la banque et des pressions financières accrues, le nouveau président devra conjuguer ambition et rigueur pour atteindre l’objectif fixé : porter les actifs d’Afreximbank à 250 milliards de dollars.

Un pur produit de la maison

Entré à Afreximbank en 1996, alors que l’institution n’avait que trois ans d’existence, George Elombi a connu tous les ressorts de cette banque multilatérale. Juriste de formation, diplômé en droit commercial international et en finance, il a d’abord fait ses armes au département juridique, où il a participé à l’élaboration des premiers instruments de facilitation du commerce africain.

Son parcours ascendant l’a conduit à occuper des postes stratégiques, culminant avec sa nomination au poste de vice-président en charge de la gouvernance institutionnelle, du juridique et de la conformité. Un portefeuille sensible, particulièrement à un moment où Afreximbank cherchait à rassurer les investisseurs internationaux et à renforcer ses standards de gestion.

Cette trajectoire au long cours lui confère une connaissance approfondie des mécanismes de la banque, de ses forces comme de ses faiblesses. Elle témoigne également d’une capacité à naviguer dans les arcanes d’une institution panafricaine où les équilibres politiques et régionaux sont aussi importants que les indicateurs financiers.

L’architecte de l’intégration financière africaine

Si George Elombi est parvenu à s’imposer au sein d’Afreximbank, c’est en grande partie grâce à son rôle dans la conception d’instruments financiers innovants. Il a notamment contribué à l’élaboration du Pan-African Payment and Settlement System (PAPSS), un mécanisme de paiement intra-africain qui vise à fluidifier les transactions entre pays du continent en contournant le recours systématique aux devises occidentales.

Ce système, opérationnel depuis 2022, est devenu l’un des piliers techniques de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf). George Elombi a également joué un rôle clé dans la mise en place de systèmes de garanties pour les échanges commerciaux interrégionaux, permettant de sécuriser des transactions dans des contextes parfois marqués par l’instabilité politique ou monétaire.

Ces réalisations témoignent d’une vision stratégique : faire d’Afreximbank non pas une simple banque de développement, mais un véritable outil d’intégration économique continentale.

Une feuille de route ambitieuse

À la tête d’Afreximbank, George Elombi hérite d’une institution en croissance mais sous pression. Son mandat repose sur trois axes majeurs : accélérer l’industrialisation du continent par le financement d’infrastructures stratégiques telles que les zones industrielles, les corridors logistiques et les usines de transformation ; booster le commerce intra-africain en levant les obstacles aux paiements, au transport et à l’assurance des risques commerciaux ; et diversifier les mécanismes de financement en mobilisant davantage le secteur privé, les diasporas et les marchés de capitaux.

Le nouveau président entend également digitaliser les services de la banque et développer des solutions de financement climato-compatibles, répondant ainsi aux nouvelles exigences des bailleurs internationaux. L’intégration des PME africaines dans les chaînes de valeur continentales figure également parmi ses priorités, dans la perspective d’une industrialisation plus inclusive.

Des défis de taille

Malgré son expertise reconnue, George Elombi devra affronter plusieurs écueils. Le premier défi concerne la gouvernance et la transparence. La dégradation de la note d’Afreximbank par une agence internationale a mis en lumière des préoccupations sur les processus internes de gestion. Rétablir la confiance des marchés financiers sera indispensable pour poursuivre les levées de fonds sur les marchés obligataires internationaux.

Le deuxième défi est celui de la gestion des risques. Dans un contexte d’instabilité géopolitique croissante et de pression sur les devises africaines, la banque devra renforcer ses dispositifs d’analyse des risques pays et de couverture des impayés. L’exposition d’Afreximbank à certaines économies fragiles pourrait devenir problématique en cas de crise majeure.

Enfin, la mobilisation des ressources restera un enjeu central. Pour atteindre l’objectif de 250 milliards de dollars d’actifs, Afreximbank devra intensifier ses levées de fonds tout en consolidant sa base de capital via les contributions étatiques et les partenariats institutionnels. Un exercice d’équilibriste dans un environnement financier international de plus en plus volatil.

Un pari sur la continuité

En choisissant George Elombi, les États actionnaires d’Afreximbank ont privilégié la continuité et l’expertise interne. Ce choix reflète une volonté de consolidation plutôt que de rupture, dans une période où la stabilité institutionnelle est perçue comme un atout.

Pour les économies comme la Côte d’Ivoire, deuxième contributeur d’Afrique de l’Ouest à Afreximbank après le Nigéria, les réformes impulsées par le nouveau président pourraient ouvrir de nouvelles perspectives de financement, notamment dans les secteurs de l’agroalimentaire, de la logistique et des infrastructures.

Reste à savoir si George Elombi parviendra à transformer son expertise technique en leadership stratégique, capable de porter une vision continentale tout en maintenant la solidité financière de l’institution. Les trois prochaines années seront décisives.


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