L’Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi face à son plus grand défi depuis l’ère Ghosn
Le constructeur automobile japonais Nissan traverse la pire crise de son histoire récente. Dans une annonce qui a secoué l’industrie automobile mondiale, le groupe a dévoilé un plan de restructuration d’une ampleur sans précédent, prévoyant la suppression de 20 000 emplois, soit environ 15% de ses effectifs mondiaux, et la fermeture de sept de ses 17 usines d’ici 2027.
Cette décision drastique intervient après l’enregistrement d’une perte nette colossale de 670 milliards de yens (4,5 milliards de dollars) pour l’exercice fiscal clos en mars 2025. Il s’agit de l’une des pires performances financières du constructeur depuis deux décennies.
Le plan “Re:Nissan” : un tournant stratégique sous pression
Face à cette situation alarmante, le nouveau PDG de Nissan, Ivan Espinosa, a présenté le plan “Re:Nissan”, une stratégie ambitieuse visant à réduire les coûts de 500 milliards de yens (3,4 milliards de dollars) et à recentrer la production sur les véhicules électriques, notamment au Royaume-Uni.
Cependant, cette transition s’annonce particulièrement complexe dans un contexte de baisse significative des ventes en Chine et aux États-Unis. Les récentes tensions commerciales et l’instauration de nouveaux tarifs douaniers américains viennent également compliquer l’équation pour le constructeur japonais.
Renault, principal partenaire, subit le contrecoup
La crise de Nissan impacte directement son partenaire historique, Renault, qui détient une participation de 15% dans le groupe japonais. Le constructeur français prévoit désormais une dépréciation massive de 2,2 milliards d’euros (2,4 milliards de dollars) liée aux pertes de Nissan.
Cette situation vient fragiliser davantage une Alliance déjà affaiblie par des tensions internes et des divergences stratégiques. En février 2025, l’échec des discussions de fusion entre Nissan et Honda a mis en évidence les difficultés du constructeur japonais à trouver de nouveaux partenariats solides pour rebondir.
Plus récemment, Nissan a également annoncé son retrait de la coentreprise avec Renault en Inde, laissant le constructeur français seul aux commandes sur ce marché considéré comme stratégique pour l’avenir.
L’ombre de Carlos Ghosn plane sur l’Alliance
Cette crise majeure ravive inévitablement les débats sur l’héritage de Carlos Ghosn, l’ancien PDG emblématique de l’Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi. Au début des années 2000, Ghosn avait orchestré le redressement spectaculaire de Nissan grâce à des mesures tout aussi drastiques que celles annoncées aujourd’hui : suppression de 21 000 emplois, fermeture de cinq usines au Japon et réduction du nombre de fournisseurs.
Cependant, sa stratégie axée sur la croissance rapide et les économies d’échelle est aujourd’hui remise en question. Depuis son éviction en 2018 et sa fuite controversée du Japon, Ghosn n’a cessé de critiquer la direction actuelle de Nissan, qualifiant l’entreprise de “fade et médiocre” et allant jusqu’à prédire son effondrement. L’ancien dirigeant attribue les difficultés actuelles à une perte de vision stratégique et à une gestion inefficace de l’Alliance.
Implications pour l’Afrique et la Côte d’Ivoire
Les répercussions de cette crise pourraient se faire sentir jusqu’en Afrique, notamment en Côte d’Ivoire, où Renault est un acteur majeur du marché automobile. Une réduction des investissements ou des retards dans les livraisons de véhicules risquent d’impacter les concessionnaires locaux et les consommateurs ivoiriens.
Par ailleurs, la fragilisation de l’Alliance pourrait compromettre les projets de développement de véhicules spécifiquement adaptés aux marchés africains, qui représentent pourtant un potentiel de croissance considérable pour les constructeurs automobiles.
Une Alliance à réinventer
La crise actuelle chez Nissan et son impact sur Renault soulignent la nécessité de repenser en profondeur la gouvernance et la stratégie de l’Alliance. Si le modèle institué par Carlos Ghosn a permis un redressement spectaculaire il y a deux décennies, il apparaît aujourd’hui que la pérennité de ce partenariat dépendra de sa capacité à s’adapter aux nouvelles réalités du marché mondial.
Le défi est de taille, particulièrement dans un contexte de transition accélérée vers les véhicules électriques et de réorientation stratégique vers les marchés émergents. L’avenir dira si cette restructuration majeure permettra à Nissan de se relever et à l’Alliance de retrouver sa dynamique d’antan.
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