Le naufrage du dernier bateau d'Aqualines survenu le week-end dernier dans la lagune Ébrié marque la fin d'une entreprise qui incarnait une vision alternative pour les transports abidjanais. La Compagnie Ivoirienne de Transports Lagunaires (CITRANS), fondée en 2014 par Zoumana Bakayoko, dit "Capitaine Zoumbak", s'était positionnée comme une solution innovante face aux problèmes de congestion routière d'Abidjan.
Une vision prometteuse mais des fondations fragiles
CITRANS avait obtenu une concession de 25 ans pour exploiter le transport sur la lagune Ébrié, développant plusieurs lignes stratégiques reliant des quartiers comme Treichville, Abobo Doumé et Bingerville. La compagnie proposait un service fréquent - toutes les quinze minutes - avec des embarcations modernes et des tarifs compétitifs.
Cependant, malgré un concept novateur, l'entreprise n'a pas réussi à stabiliser son modèle économique. Les revenus générés par la billetterie et quelques partenariats publicitaires se sont avérés insuffisants pour couvrir les coûts opérationnels et de maintenance. Le retrait progressif des investisseurs initiaux a précipité les difficultés financières.
Des défaillances managériales déterminantes
La gestion de CITRANS, incarnée par son PDG Zoumana Bakayoko, a été remise en question. Des problèmes de gouvernance ont culminé en 2022 avec une grève majeure qui a paralysé l'ensemble des opérations. Cette crise, associée à des retards de paiement et une maintenance insuffisante, a considérablement érodé la confiance des usagers. L'instabilité interne a compromis la fidélisation d'une clientèle pourtant initialement réceptive.
Un marché concurrentiel maîtrisé par d'autres acteurs
Pendant que CITRANS sombrait, d'autres opérateurs ont su se maintenir et prospérer sur la lagune. La Société des Transports Abidjanais (SOTRA) et la Société de Transport Lagunaire (STL) ont démontré qu'un modèle économique viable était possible, à condition de bénéficier d'une gestion rigoureuse, d'investissements constants et, pour la SOTRA, d'un soutien public.
Enseignements pour le secteur des transports ivoiriens
L'échec de CITRANS constitue un cas d'étude significatif pour le développement des infrastructures de transport en Côte d'Ivoire. Dans une métropole comme Abidjan, naturellement dotée d'un réseau lagunaire, le transport fluvial représente une opportunité réelle pour améliorer la mobilité urbaine.
Les facteurs déterminants pour la réussite de tels projets incluent:
- Un financement pérenne et des investissements continus
- Une maintenance rigoureuse des équipements
- Une gouvernance professionnelle et anticipative
- Une gestion des ressources humaines efficace
Pour les opérateurs encore actifs comme la SOTRA et la STL, cet échec représente une opportunité d'améliorer leurs services et de renforcer leur position sur ce segment stratégique du transport urbain abidjanais.
L'histoire de CITRANS illustre le décalage qui peut exister entre une vision entrepreneuriale ambitieuse et sa mise en œuvre concrète, rappelant que dans le domaine du transport lagunaire, comme dans toute entreprise, une navigation prudente reste indispensable.Réessayer
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