Créée en 2005, la Confédération Générale des Entreprises de Côte d’Ivoire s’est imposée comme l’interlocuteur incontournable du secteur privé national. Retour sur le parcours d’une organisation qui fédère aujourd’hui plus de 3 500 entreprises.
Lorsque la Confédération Générale des Entreprises de Côte d’Ivoire (CGECI) voit le jour en mai 2005, l’ambition est claire : doter le secteur privé ivoirien d’une voix unique et représentative. Vingt ans plus tard, le pari semble réussi. L’organisation patronale fédère désormais 27 groupements professionnels et plus de 200 entreprises adhérentes directes, représentant près de 80% du secteur privé formel du pays.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les membres de la CGECI cumulent plus de 17 000 milliards de FCFA de chiffre d’affaires et emploient quelque 300 000 salariés. Plus largement, la confédération revendique plus de 3 500 entreprises adhérentes, qui contribuent à plus de 80% des recettes fiscales de l’État et environ 40% des emplois formels en Côte d’Ivoire.
Une transformation structurelle réussie
Cette montée en puissance ne doit rien au hasard. La CGECI est née de la restructuration du Conseil National du Patronat Ivoirien (CNPI), lui-même successeur de l’Union Patronale de Côte d’Ivoire dissoute en 1993. Cette transformation visait à créer une organisation plus inclusive et mieux armée face aux défis de la mondialisation.
Sous la présidence fondatrice de Jean Kacou Diagou, dirigeant du groupe NSIA, qui a dirigé l’organisation pendant onze ans (2005-2016), le patronat ivoirien a gagné en visibilité malgré les crises politico-militaires des années 2000. Son successeur, Jean-Marie Ackah du groupe SIPRA, a poursuivi cette dynamique de 2016 à 2022, avant de céder la place à Ahmed Cissé, entrepreneur formé aux États-Unis, élu en décembre 2022.
Cette continuité dans le leadership témoigne d’une institutionnalisation réussie. La gouvernance s’articule autour d’une Assemblée Générale, d’un Conseil d’Administration et d’une Direction Exécutive, complétée par onze commissions permanentes thématiques qui mobilisent l’expertise du secteur privé sur des domaines variés.
Des services concrets aux entreprises
Au-delà de sa fonction représentative, la CGECI a développé un éventail de services directs à ses adhérents. Le Centre d’Appui et de Développement des Entreprises (CADE) constitue la “boîte à outils” de l’organisation, proposant formations, accompagnement et assistance technique aux entreprises de toutes tailles.
L’organisation a noué des partenariats prestigieux avec des institutions comme HEC Paris, Sciences Po ou l’université de Stanford pour améliorer les compétences des dirigeants locaux. Elle publie régulièrement des études sectorielles, un baromètre économique et des alertes fiscales pour informer ses membres des évolutions réglementaires.
La “Maison de l’Entreprise”, siège inauguré en 2017 au Plateau, symbolise cette approche de service. Ce centre de développement des affaires héberge sous un même toit des guichets dédiés aux entrepreneurs, des espaces de formation et de co-working.
La CGECI Academy, vitrine du patronat
L’événement phare reste sans conteste la CGECI Academy, grand forum économique annuel lancé en 2012. Devenu l’événement majeur du secteur privé ivoirien, ce rendez-vous de deux jours réunit plusieurs milliers de participants autour de l’entrepreneuriat et du développement économique.
En 2022, la dixième édition, couplée à la Rencontre des Entrepreneurs Francophones, a confirmé le rayonnement international de l’événement. Cette capacité à attirer des délégations venues d’Europe, du Maghreb et d’Afrique subsaharienne illustre l’ambition régionale de la CGECI.
D’autres initiatives complètent ce dispositif : le forum “La Finance s’Engage” pour faciliter l’accès au crédit des PME, le Programme “Champion National” pour accompagner les entreprises à fort potentiel, ou encore l’initiative PRODIJE d’incubation pour jeunes entrepreneurs.
Un lobbying efficace mais perfectible
Sur le plan de l’influence politique, la CGECI peut revendiquer plusieurs succès. Elle a contribué à la création du Tribunal de commerce d’Abidjan en 2012, à la mise en place du Guichet Unique de l’Investisseur, et a participé activement aux négociations sur la révision du Code du travail en 2015.
Le patronat copréside le Comité de Concertation État-Secteur Privé depuis 2012 et siège dans de nombreuses instances consultatives. Cette présence institutionnelle lui permet de peser sur l’élaboration des politiques, comme en témoignent les progrès de la Côte d’Ivoire dans le classement Doing Business : de la 168e place en 2009 à la 110e en 2020.
Toutefois, certains blocages persistent. Le coût élevé du crédit pour les PME, la lourdeur fiscale ou la concurrence du secteur informel demeurent des défis majeurs malgré les plaidoyers répétés du patronat.
Un rayonnement continental
La CGECI ne limite pas son action aux frontières nationales. Membre fondateur de la Fédération des Organisations Patronales de l’Afrique de l’Ouest (FOPAO), elle participe à l’Alliance des Patronats Francophones et collabore étroitement avec des homologues continentaux.
L’entrée en vigueur de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) en 2021 ouvre de nouvelles perspectives. La CGECI s’emploie à préparer les entreprises ivoiriennes à ce marché de 1,2 milliard de consommateurs, tout en mesurant les défis de compétitivité que représente cette ouverture.
Les défis de demain
À l’approche de l’horizon 2030 et de l’émergence visée par la Côte d’Ivoire, la CGECI fait face à plusieurs enjeux. Elle doit continuer à élargir sa base pour mieux représenter les PME et les entrepreneurs de l’intérieur, tout en accompagnant la digitalisation de l’économie.
Le nouveau président Ahmed Cissé a d’ailleurs affiché sa volonté de porter “une plus grande attention aux PME”, reconnaissant que l’organisation a parfois été perçue comme trop proche des grands groupes.
L’engagement en matière de développement durable et inclusif constitue un autre défi. La CGECI promeut déjà la Responsabilité Sociétale des Entreprises et l’entrepreneuriat féminin, mais devra intensifier ces efforts pour accompagner une croissance véritablement inclusive.
Vingt ans après sa création, la CGECI a réussi sa mue d’organisation corporatiste en véritable partenaire du développement économique. Son avenir reste intimement lié à celui de l’économie ivoirienne, dont elle aspire à demeurer le catalyseur et le gardien vigilant sur la voie de l’émergence.
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