Le 17ᵉ sommet des BRICS+ à Rio de Janeiro marque un tournant dans l’ordre économique mondial. Vladimir Poutine y a déclaré la “mondialisation libérale” obsolète, prônant un système multipolaire centré sur les marchés émergents.
Les déclarations du président russe lors du sommet de Rio de Janeiro du 6 juillet 2025 résonnent comme un manifeste pour un nouvel ordre économique international. “Tout indique que le modèle de mondialisation libérale devient obsolète”, a-t-il affirmé en visioconférence, pointant le “déplacement du centre de l’activité économique vers les marchés émergents”.
Un bloc en expansion qui défie l’hégémonie occidentale
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les BRICS+ représentent désormais 45% de la population mondiale et leur PIB nominal cumulé de 28 000 milliards de dollars rivalise avec celui du G7 (51 000 milliards). Cette performance économique impressionnante s’appuie sur l’élargissement du groupe, devenu BRICS+ en 2024 avec l’adhésion de l’Égypte, de l’Éthiopie, de l’Iran, des Émirats arabes unis et de l’Indonésie, portant le total à 10 pays membres.
Cette expansion traduit une ambition claire : remodeler l’architecture économique internationale en proposant une alternative au système dominé par les puissances occidentales. Le bloc réunit aujourd’hui près de 50% de la population mondiale et environ 40% du PIB global, constituant un contrepoids géopolitique de premier plan.
La dédollarisation au cœur de la stratégie
L’un des axes majeurs de cette révolution économique concerne la remise en cause de la domination du dollar américain. Les BRICS ont déjà réduit de 33% la part du dollar dans leurs échanges commerciaux, privilégiant l’usage de leurs monnaies nationales. Cette dédollarisation progressive s’inscrit dans une démarche plus large de création d’un ordre monétaire multipolaire, s’émancipant du système unipolaire hérité de la seconde moitié du XXᵉ siècle.
Poutine a appelé les États membres à “intensifier la coopération” dans plusieurs domaines stratégiques : ressources naturelles, logistique, commerce et finance. Cette approche vise à créer des chaînes de valeur intégrées, réduisant la dépendance vis-à-vis des circuits économiques traditionnels.
Des opportunités pour l’Afrique
Pour le continent africain, cette recomposition géoéconomique ouvre des perspectives inédites. La diversification des partenaires commerciaux permet d’envisager des accords plus équilibrés, en monnaie locale ou via des mécanismes de troc technologique. La Nouvelle Banque de Développement (NDB), institution financière des BRICS, propose des prêts structurés sans conditions strictes, favorisant les projets d’infrastructures africaines.
Cette dynamique Sud-Sud offre aux pays africains l’opportunité de renforcer leur intégration régionale et d’accélérer leur industrialisation, en s’appuyant sur la coopération logistique et les chaînes de valeur promues par les BRICS+.
Les défis d’une construction complexe
Malgré ces ambitions, le projet BRICS+ fait face à des obstacles majeurs. L’hétérogénéité politique du groupe, mêlant démocraties (Inde, Brésil, Afrique du Sud) et régimes autoritaires (Russie, Chine, Iran), complique l’unité stratégique. Les divergences géopolitiques persistent, nombre d’États membres restant fortement imbriqués économiquement avec l’Occident.
L’absence physique de figures clés comme Xi Jinping, représenté par son Premier ministre, et la participation en visioconférence de Poutine – en raison de son mandat d’arrêt international – soulignent une cohésion encore fragile. L’institutionnalisation du projet nécessite des technologies sophistiquées et une confiance mutuelle, deux éléments encore en construction.
Vers un monde multipolaire
Le sommet de Rio marque indéniablement un tournant discursif majeur dans la géoéconomie mondiale. La contestation frontale de la mondialisation libérale par les BRICS+ témoigne d’une volonté de refondation de l’ordre international, privilégiant un modèle plus équitable et régionalisé.
Cette transition vers un monde multipolaire sera néanmoins progressive. Elle dépendra de la capacité du bloc à concilier sa diversité politique avec des projets communs ambitieux, et à construire des institutions financières fonctionnelles et souveraines. L’enjeu est de taille : réussir à créer un système économique alternatif viable, capable de rivaliser durablement avec l’hégémonie occidentale.
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