Maroc : pour relancer l’économie, Mohammed VI fixe une feuille de route en trois pôles

Maroc : pour relancer l’économie, Mohammed VI fixe une feuille de route en trois pôles

Intervenant dans un contexte toujours inédit, le discours du chef de l’Etat marocain de vendredi dernier dresse les grandes lignes d’un plan ambitieux de relance économique et d’un grand projet de couverture sociale universelle, auxquels seront associées les règles de bonne gouvernance et une réforme des établissements publiques. Décryptage.

Le traditionnel discours d’ouverture de la session parlementaire d’automne adressé par le roi Mohammed VI vendredi dernier revêt un caractère particulier cette année. Diffusé pour la première fois en direct à l’intérieur de l’enceinte du parlement, il acte l’ouverture de la session parlementaire selon les dispositions de la Constitution, tout en prenant en considération la situation sanitaire exceptionnelle. « En ces circonstances exceptionnelles, Nous ouvrons la présente année législative sous un format inédit », a rappelé le roi Mohammed VI.

Sur le fond, le discours royal de ce vendredi intervient dans la continuité de celui du 21 août dernier, mais en précisant cette fois-ci les contours de la feuille de route nationale pour les prochaines années. Si. la priorité absolue est donnée à la maitrise de la pandémie, le discours royal insiste parallèlement sur une action forte pour le redressement économique et social. Un discours qui n’est ni dans le « tout sanitaire » ni dans le « tout économique » : « Dans ces conditions, pour préserver la santé et la sécurité des citoyens, il est primordial de faire preuve d’une opiniâtre vigilance et d’un engagement résolu en apportant au secteur sanitaire un soutien indéfectible. Il importe d’œuvrer, concomitamment, à la stimulation de l’activité économique et au renforcement de la protection sociale », a annoncé le chef de l’Etat marocain.

La feuille de route royale, étayée ce vendredi par le roi Mohammed VI, s’articule désormais autour de trois principaux chantiers : la relance économique, une couverture social universelle, la réforme des établissements publics, le tout prenant en compte les règles de bonne gouvernance.

Relance économique, une priorité déjà en marche

« Cette crise a révélé un ensemble de dysfonctionnements, de déficits et elle a eu un impact négatif sur l’économie nationale et l’emploi. C’est pourquoi Nous avons lancé un plan ambitieux de relance économique et un grand projet de couverture sociale universelle. Nous avons également souligné l’impératif d’appliquer les règles de bonne gouvernance et la nécessité de réformer les établissements du secteur public […]. A cet égard, Nous plaçons le plan de relance économique en tête des priorités de l’étape actuelle ».

Le ton est donné. Le plan de relance économique sera la priorité de la feuille de route royale. En août dernier d’ailleurs, le chef de l’Etat marocain, dans son discours du Trône, demandait la mise en œuvre d’un plan ambitieux de relance économique. Evalué à 120 milliards de dirhams (11% du PIB), le plan comprend deux dispositifs principaux : un dispositif de prêts garantis par l’Etat et un Fonds d’investissement stratégique.

Dans le détail comme le précise le Roi, ce plan soutiendra les secteurs productifs, notamment le tissu des PME, avec l’objectif de rehausser leur capacité à investir, à créer des emplois et à préserver les sources de revenu.

En termes d’applicabilité, le plan devra être réalisé dans « un cadre contractuel national, impliquant l’État ainsi que les partenaires économiques et sociaux et se fondant sur le principe de corrélation entre droits et obligations », insiste le souverain marocain.

D’ailleurs, les entités ( 20 000) qui, à ce jour, ont bénéficié du dispositif des prêts garantis par l’Etat avec un montant avoisinant les 26 milliards de dirhams, ont prouvé leur résilience face à la crise dont elles sont parvenues à atténuer les effets en préservant les emplois.

Précision de taille, le plan de relance sera adossé à un instrument d’accompagnement et de financement : le Fonds Mohammed VI pour l’investissement. « Le plan de relance économique repose sur le Fonds d’investissement stratégique dont Nous avons préconisé la création et auquel Nous avons décidé de donner le nom de « Fonds Mohammed VI pour l’Investissement. Nous souhaitons vivement que ce Fonds joue un rôle de premier plan dans la promotion de l’investissement et le relèvement des capacités de l’économie nationale. Il interviendra pour doter les secteurs productifs du soutien nécessaire et pour financer et accompagner les grands projets envisagés, dans le cadre de partenariats public-privé », a annoncé le Roi dans son discours de vendredi dernier.

Désormais instrument central de la relance post-Covid, le fonds portant le nom du souverain, avec toute la symbolique que cela implique sur le plan de l’exécution, sera orienté vers l’investissement, et sera d’une enveloppe de 15 milliards de dirhams à partir du budget de l’Etat. « Nous avons également donné Nos Directives pour que ce fonds soit doté de 15 milliards de dirhams provenant du budget de l’État. L’allocation de ces crédits incitera les partenaires marocains et internationaux à accompagner les interventions du fonds et à contribuer aux projets d’investissement à venir. Ainsi, l’appui apporté au Plan de relance permettra d’en amplifier l’impact économique, social et environnemental », a annoncé le roi Mohammed VI.

Par ailleurs, les chantiers prioritaires sur lesquelles porteront les « investissements de la relance » comprennent la restructuration industrielle ; les secteurs émergents et à forte valeur ; la relance de la PME ; les infrastructures ; l’agriculture ; et le tourisme.

Généralisation de la couverture sociale d’ici 2021

« Notre souci a toujours été que la dynamique de développement économique soit articulée à la promotion du secteur social, à l’amélioration des conditions de vie des citoyens. Aussi avons-Nous appelé à la généralisation de la couverture sociale au profit de tous les Marocains ».

Second chantier majeur de la feuille de route royale pour les prochaines années, le projet de généralisation de la couverture sociale pour tous les Marocains s’articule autour de principaux axes : étendre, d’ici la fin 2022 au plus tard, la couverture médicale obligatoire, de sorte que 22 millions de bénéficiaires additionnels accèdent à l’Assurance maladie de base qui couvre les frais de soins, de médicaments, d’hospitalisation et de traitement. Puis, la généraliser les allocations familiales qui bénéficieront ainsi à près de sept millions d’enfants en âge de scolarité, au profit de trois millions de familles. Ensuit l’élargissement de la base d’adhérents au système de retraite en y incorporant quelques cinq millions de Marocains parmi la population active non titulaire d’un droit à une pension. Et enfin, la généralisation de l’accès à l’indemnité pour perte d’emploi au profit des Marocains ayant un emploi régulier.

Réformer le secteur public pour réussir la relance

« Indépendamment de ses objectifs, la réussite de tout plan ou projet est tributaire de l’adoption des principes de bonne gouvernance et de reddition des comptes ». Plusieurs fois évoquée par le chef de l’Etat marocain, la bonne gouvernance, la réédition des comptes, la performance de la sphère publique et l’attractivité pour les talents et les compétences restent des conditions sine qua none pour la réussite de tout projet, surtout stratégique ou à envergure nationale. A cet égard, « les institutions de l’Etat et les entreprises publiques doivent montrer une attitude exemplaire et agir comme un levier de développement, et non comme un frein », rappelle le roi Mohammed VI. Pour le souverain marocain, « le succès du plan de relance économique et la mise en place d’un nouveau contrat social nécessitent une évolution réelle des mentalités et un véritable changement dans le niveau de performance des établissements publics ». D’ailleurs, c’est dans ce contexte que doit intervenir l’Agence nationale des participations, que le Roi a demandé de mettre en place dans son discours du Trône et qui aura Cette agence aura désormais une double mission : la gestion stratégique du portefeuille de l’Etat et le pilotage des performances des entreprises publiques.

Le tournant imposé par la crise actuelle impose en effet un nouvel élan, davantage d’engagement et des profils à la hauteur des enjeux dans tous les secteurs. Parce que la réussite du plan de relance se fera par l’intervention du secteur public qui a aujourd’hui grandement besoin de hauts cadres alliant compétence technique et managériale et un grand sens d’éthique et de responsabilité.

Lire la suite sur https://afrique.latribune.fr/