Le continent a importé 1,57 GW de panneaux photovoltaïques en mai 2025, un record alimenté par la domination chinoise et les nouvelles stratégies de financement du Japon qui promet 5,5 milliards de dollars d’investissements.
L’Afrique vit une révolution énergétique sans précédent. En mai 2025, le continent a établi un record historique avec 1,57 gigawatts de panneaux photovoltaïques importés, illustrant une transition accélérée vers l’énergie solaire. Cette dynamique transforme radicalement le paysage énergétique africain tout en cristallisant les rivalités géopolitiques entre grandes puissances.
L’explosion des importations solaires
Les chiffres témoignent d’une véritable ruée vers l’or solaire. L’Algérie exemplifie cette tendance avec une explosion de 6 300% de ses importations par rapport à la même période l’année précédente. De Nairobi à Dakar, les modules solaires recouvrent désormais toits, zones industrielles et projets ruraux, répondant à une demande énergétique croissante et aux défaillances chroniques des réseaux traditionnels.
Cette transition massive s’appuie sur la baisse continue du coût des panneaux solaires, rendue possible par les économies d’échelle et les innovations technologiques. Pour de nombreux États africains confrontés aux coupures d’électricité et au déficit d’accès à l’énergie, le solaire représente une solution immédiate et économiquement viable.
La Chine, architecte de la transition africaine
L’empire du Milieu ne se contente plus d’être un simple fournisseur : il s’impose comme le pilier industriel de la transition énergétique africaine. Contrôlant plus de 80% de la production mondiale de panneaux photovoltaïques, les entreprises chinoises proposent des prix défiant toute concurrence grâce à des subventions étatiques massives et une maîtrise complète de la chaîne d’approvisionnement.
Cette domination industrielle soulève néanmoins des interrogations légitimes. La dépendance excessive aux importations chinoises expose les pays africains à la volatilité des prix mondiaux et limite leur autonomie stratégique. L’absence de capacités de production locales fragilise également la souveraineté énergétique du continent à long terme.
La riposte japonaise : financement et formation
Face à l’hégémonie chinoise, le Japon déploie une stratégie alternative axée sur le financement et le transfert de compétences. Lors du sommet TICAD de Yokohama, Tokyo a annoncé une enveloppe de 5,5 milliards de dollars de prêts concessionnels destinés à l’énergie, aux infrastructures et à la digitalisation du continent africain.
Cette approche japonaise se distingue par son volet formation, avec l’engagement de former 30 000 experts en intelligence artificielle. Cette stratégie vise à offrir une alternative aux modèles chinois, souvent critiqués pour leur opacité et les risques d’endettement qu’ils génèrent. Les financements japonais privilégient des conditions plus souples, mettant l’accent sur le transfert de savoir-faire et le développement des compétences locales.
L’Occident en ordre dispersé
Les pays occidentaux peinent à proposer une réponse coordonnée face aux offensives sino-japonaises. Malgré l’existence d’initiatives comme Power Africa, les Team Europe Initiatives ou l’Alliance solaire internationale, ces programmes manquent souvent de visibilité et de réactivité face aux besoins urgents du terrain.
Néanmoins, de nouveaux modèles émergent progressivement : partenariats public-privé innovants, solutions de leasing solaire et mécanismes de micro-financement décentralisé. Ces approches pourraient constituer des leviers intéressants, à condition d’être mieux coordonnées et adaptées aux réalités locales.
Les défis structurels de la transition
L’importation massive de panneaux solaires, bien qu’elle réponde à l’urgence énergétique, soulève plusieurs défis structurels majeurs. La dépendance industrielle demeure critique, avec très peu de pays africains disposant d’unités locales d’assemblage ou de production de panneaux photovoltaïques.
L’accès au financement local constitue également un frein persistant. Les projets solaires peinent à lever des fonds sur les marchés africains, souvent considérés comme trop risqués par les investisseurs locaux. Parallèlement, la pénurie de compétences techniques – ingénieurs, installateurs, techniciens spécialisés – limite la capacité d’absorption et de maintenance des équipements importés.
Opportunités stratégiques pour l’Afrique
À long terme, la réussite de cette transition énergétique nécessitera un renforcement des chaînes de valeur locales et une diversification stratégique des partenaires financiers. Le développement de centres de formation régionaux apparaît crucial pour combler le déficit de compétences techniques.
Pour des pays comme la Côte d’Ivoire, dotés d’un fort potentiel solaire avec près de 5 kWh/m²/jour, les opportunités sont considérables. L’établissement d’usines d’assemblage de panneaux pour desservir l’Afrique de l’Ouest, le renforcement de la formation en génie solaire et la diversification des partenariats internationaux constituent autant de leviers pour tirer profit de cette révolution énergétique.
La bataille qui se joue autour de l’énergie solaire africaine dépasse le simple enjeu commercial. Elle dessine les contours d’un nouveau rapport de force géopolitique où la maîtrise technologique et l’influence économique détermineront les équilibres de demain sur le continent.
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