Avec un chiffre d’affaires qui bondit de 40 à 561 milliards FCFA en moins d’une décennie, la Loterie Nationale de Côte d’Ivoire (LONACI) illustre parfaitement comment une entreprise publique peut allier performance économique et mission citoyenne. Portrait d’un acteur incontournable de l’économie ivoirienne.
Créée en 1970, la LONACI s’impose aujourd’hui comme un modèle unique dans le paysage économique ouest-africain. Cette société anonyme à participation publique majoritaire (État 80%, CNPS 15%, employés 5%) a su transformer le monopole légal des jeux de hasard en véritable machine de croissance au service du développement national.
Une croissance spectaculaire portée par l’innovation
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : en 2024, LONACI a réalisé 561,24 milliards FCFA de chiffre d’affaires, dépassant ses propres objectifs. Cette performance place l’entreprise au 7e rang des plus grandes entreprises ivoiriennes, confirmant une trajectoire ascendante remarquable depuis 2015.
Cette croissance s’appuie sur une stratégie de diversification audacieuse. Loin de se contenter du traditionnel Loto Bonheur, l’entreprise dirigée par Dramane Coulibaly depuis 2017 a élargi son portefeuille : jeux de grattage, paris sportifs Sportcash, PMU, et plus récemment, casino en ligne et loterie virtuelle. Une offre désormais accessible 24h/24 grâce à la plateforme LONACI Online lancée en 2021.
Le numérique comme catalyseur de transformation
La digitalisation constitue l’un des paris les plus ambitieux de LONACI. Avec pour objectif d’atteindre 25% du chiffre d’affaires via le canal numérique, l’entreprise a investi massivement dans sa transformation digitale. Le code USSD *590# permet même aux détenteurs de téléphones basiques d’accéder aux jeux, démocratisant l’offre sur l’ensemble du territoire.
Cette stratégie numérique répond aussi à un enjeu de régulation. Face à la prolifération des jeux illégaux – “loto ghanéen”, machines à sous non homologuées – LONACI mise sur la traçabilité et la sécurité pour protéger les joueurs tout en préservant son modèle économique. Un défi d’autant plus crucial que ces activités illicites représentent un manque à gagner considérable pour l’entreprise et l’État.
Un modèle économique au service de l’intérêt général
La force du modèle LONACI réside dans sa capacité à transformer les gains commerciaux en bénéfices collectifs. Sur les 561 milliards FCFA de 2024, l’entreprise a reversé 288 milliards aux joueurs et 48,65 milliards en commissions aux 11 000 points de vente, créant un écosystème de 25 000 emplois indirects.
L’État, quant à lui, perçoit une redevance de concession (15 milliards en 2024) et des impôts (8,28 milliards), soit plus de 20 milliards FCFA qui alimentent directement le budget national. Dans un contexte où les ressources publiques restent limitées, cette contribution fiscale représente un apport non négligeable.
La responsabilité sociale comme ADN
Au-delà des retombées fiscales, LONACI assume pleinement sa vocation citoyenne à travers sa Fondation, dotée d’un capital initial d’1 milliard FCFA. Écoles, centres de santé, forages, équipements médicaux : les investissements sociaux de l’entreprise touchent tous les secteurs du développement humain.
En 2024, 6,75 milliards FCFA ont été consacrés aux projets sociaux de la Fondation. Ces initiatives s’inscrivent dans une démarche structurée de responsabilité sociale, reconnue internationalement par l’obtention du certificat WLA Jeu Responsable Niveau 2 de la World Lottery Association.
Cette approche responsable se traduit aussi par des mesures concrètes de prévention de l’addiction : messages d’alerte, formation du personnel, limites de mise, et partenariats avec des associations spécialisées. Un équilibre délicat entre développement économique et protection de la santé publique.
Des défis à la hauteur des ambitions
Malgré ses succès, LONACI navigue dans un environnement complexe. La régulation du secteur, assurée par l’Autorité de régulation des jeux de hasard (ARJH), évolue constamment. Le décret de 2023 a d’ailleurs renforcé la protection des produits exclusifs de LONACI pour mieux lutter contre la concurrence déloyale.
La cybersécurité représente un autre défi majeur. Avec la montée en puissance du numérique, les tentatives d’attaques informatiques se multiplient, nécessitant des investissements constants in sécurité. La certification ISO 27001 en cours vise précisément à renforcer cette protection.
Cap sur 2025 : des objectifs ambitieux
Pour 2025, LONACI s’est fixé un objectif de 629 milliards FCFA de chiffre d’affaires. Cette ambition s’appuie sur plusieurs leviers : expansion des paris sportifs, croissance du parc de joueurs digitaux, et lancement de nouveaux produits comme les courses hippiques en partenariat avec le Maroc.
L’entreprise mise également sur l’innovation technologique – intelligence artificielle, data management – pour améliorer l’expérience client et optimiser ses opérations. Une stratégie qui pourrait faire de LONACI une référence continentale en matière de loterie responsable et performante.
Un modèle exportable ?
Président de l’Association des Loteries d’Afrique (ALA), Dramane Coulibaly plaide pour une harmonisation régionale des réglementations. Le modèle LONACI, alliant rentabilité et responsabilité sociale, pourrait inspirer d’autres pays africains en quête d’entreprises publiques performantes.
Dans un contexte continental où la gouvernance des entreprises d’État fait souvent débat, LONACI démontre qu’excellence opérationnelle et mission de service public peuvent parfaitement coexister. Une leçon d’autant plus précieuse que l’entreprise maintient sa trajectoire de croissance tout en renforçant son impact social.
La LONACI incarne ainsi une nouvelle génération d’entreprises publiques africaines : technologiquement avancées, socialement responsables, et économiquement performantes. Un triptyque qui pourrait bien redéfinir le rôle des entreprises d’État dans le développement continental.
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