Barry Callebaut, premier fabricant mondial de produits de chocolat et de cacao de haute qualité, s’impose comme un acteur incontournable du secteur cacaoyer ivoirien depuis plus d’un demi-siècle. Dans un pays qui règne en tant que premier producteur mondial de cacao, l’empreinte de ce géant suisse mérite une analyse approfondie tant son influence façonne l’économie locale et la vie de milliers de producteurs.
Une présence historique et des capacités en expansion
La relation entre Barry Callebaut et la Côte d’Ivoire remonte à 1964, année de création de sa filiale, la Société Africaine de Cacao (SACO). Cette présence de longue date témoigne d’un ancrage profond dans le paysage économique ivoirien. Le groupe lui-même est né en 1996 de la fusion entre le chocolatier belge Callebaut (fondé en 1850) et le producteur français Cacao Barry (fondé en 1842).
Ces dernières années, Barry Callebaut a considérablement renforcé sa présence opérationnelle dans le pays. En 2019, l’entreprise a inauguré une nouvelle unité de transformation ultramoderne à Abidjan, fruit d’un investissement de 55 millions de francs suisses visant à augmenter sa capacité de traitement de plus de 40% d’ici 2022. Parallèlement, son usine de San Pedro a bénéficié d’un investissement de 30 millions d’euros sur deux ans, triplant sa capacité annuelle pour atteindre 105 000 tonnes dès 2008.
“Forever Chocolate” : Une stratégie de durabilité ambitieuse
Face aux défis du secteur, Barry Callebaut a lancé en 2016 sa stratégie de durabilité “Forever Chocolate”, articulée autour de quatre piliers : l’épanouissement des agriculteurs, les droits de l’homme, la protection de l’environnement et les ingrédients durables.
L’ambition est substantielle : sortir 500 000 producteurs de cacao de la pauvreté d’ici 2025. Pour y parvenir, l’entreprise a fait évoluer son approche, passant de la simple formation à un soutien plus direct avec fourniture d’intrants (engrais, matériel de plantation). En collaboration avec l’IFC et l’IDH, elle facilite également l’accès au crédit pour les agriculteurs, leur permettant d’investir dans leurs exploitations.
Sur le front des droits humains, la lutte contre le travail des enfants demeure un défi majeur. L’entreprise a déployé des systèmes de surveillance et de remédiation (CLMRS) et travaille avec des comités de protection de l’enfance dans les communautés. Selon ses derniers rapports, 91% des groupes d’agriculteurs dans sa chaîne d’approvisionnement directe entreprennent des activités de prévention et de remédiation, avec plus de 41 000 cas en cours de traitement.
L’engagement environnemental se manifeste notamment par l’objectif de devenir “positif pour la forêt” d’ici 2025. Cela implique non seulement l’arrêt de la déforestation mais aussi des efforts actifs de restauration. En 2023/24, l’entreprise rapporte avoir établi près de 34 000 hectares d’agroforesterie et distribué plus de 3,3 millions d’arbres.
Un impact communautaire diversifié
Au-delà de son activité économique, Barry Callebaut développe diverses initiatives sociales. L’entreprise finance la construction d’écoles primaires et de centres d’apprentissage dans les zones rurales, parfois en partenariat avec d’autres acteurs comme Hershey. Elle a également inauguré un centre de santé à Goh, près de San Pedro, en 2008.
Une attention particulière est portée à l’autonomisation des femmes agricultrices, avec des programmes de diversification des revenus, de formation à la production de cultures maraîchères et à l’élevage. L’entreprise soutient aussi les Associations Villageoises d’Épargne et de Crédit (AVEC) pour améliorer l’inclusion financière féminine.
Des défis persistants malgré les engagements
Malgré ces initiatives, des défis majeurs subsistent. Le travail des enfants reste une préoccupation, comme en témoignent les propres rapports de l’entreprise et les critiques externes. Barry Callebaut a même fait face à des poursuites concernant des allégations de travail des enfants dans sa chaîne d’approvisionnement.
La déforestation liée à la culture du cacao constitue un autre défi de taille, bien que l’entreprise participe à l’Initiative Cacao et Forêts (ICF) et mette en œuvre des projets d’agroforesterie, notamment en partenariat avec Nestlé.
Par ailleurs, l’entreprise est confrontée à la volatilité des prix des fèves de cacao et au déclin de la production dans la région, ce qui a d’ailleurs contribué à l’augmentation de son chiffre d’affaires en 2023/24.
Une position stratégique dans un marché concurrentiel
Dans l’arène concurrentielle, Barry Callebaut fait face à des acteurs comme Cargill et Olam, également implantés en Côte d’Ivoire. La dynamique du marché est complexe, avec des préoccupations concernant la domination potentielle des multinationales au détriment des exportateurs locaux.
Pour l’avenir, l’entreprise mise sur sa stratégie “BC Next Level” visant à améliorer ses services et son efficacité, tout en prolongeant jusqu’en 2030 son objectif d’atteindre un approvisionnement 100% durable.
Le parcours de Barry Callebaut en Côte d’Ivoire illustre parfaitement les opportunités et les défis liés à la promotion de la durabilité dans les chaînes d’approvisionnement mondiales. Le géant suisse du chocolat joue indéniablement un rôle central dans l’économie ivoirienne, mais son impact réel sur l’amélioration des conditions des producteurs et la protection de l’environnement continue de faire l’objet d’un examen attentif.
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