Waribei : quand l’innovation ivoirienne réinvente le commerce de proximité

  • 0
  • 29 vues

Dans les marchés effervescents d’Abidjan, une révolution silencieuse se joue. Waribei, startup ivoirienne fondée en 2023, bouscule les codes du commerce traditionnel en s’attaquant à un défi majeur : comment permettre aux petits commerçants d’accéder facilement au financement pour leurs stocks ? Avec une levée de fonds de 750 000 euros en octobre 2024, cette jeune pousse illustre parfaitement comment l’innovation africaine peut transformer l’économie locale.

Une solution née du terrain

L’histoire de Waribei commence par un constat simple mais crucial. En Côte d’Ivoire, des milliers de petits commerçants – épiciers de quartier, vendeuses de marché, gérants de supérettes – peinent quotidiennement à maintenir leurs stocks faute d’accès au crédit bancaire traditionnel.

Ladislas Pham, 25 ans, diplômé en finance de l’Université de Warwick, et Frédéric Fameni, spécialiste de la transformation digitale, ont identifié cette problématique comme une opportunité d’innovation. Rejoints par Fabrice-Mozart Amani, fort de plus de 15 ans d’expérience dans de grands groupes comme Unilever et Glovo, ce trio a développé une approche révolutionnaire : utiliser la fintech pour fluidifier les relations entre commerçants et fournisseurs.

“Nous travaillons au plus près des marchés pour identifier les défis quotidiens des commerçants. Waribei ne se contente pas de fournir une solution numérique, nous voulons garantir que chaque utilisateur puisse évoluer sereinement, sans se soucier de l’accès aux stocks ou aux crédits”, explique Ladislas Pham.

Le “waricode” : un QR code qui change tout

L’innovation de Waribei réside dans sa simplicité d’usage. L’application mobile permet aux commerçants de générer un “waricode”, un QR code unique correspondant à une avance de trésorerie calculée selon leur profil. Lorsque le commerçant se rend chez son grossiste habituel – partenaire de la plateforme –, il suffit de présenter ce code pour repartir immédiatement avec la marchandise, sans avancer de fonds.

Cette mécanique transforme radicalement la chaîne d’approvisionnement. Le détaillant dispose d’un délai pour rembourser Waribei après avoir écoulé ses stocks, tandis que le grossiste est payé immédiatement par la plateforme. “Nous tous fournisseurs avons besoin de proposer des facilités de paiement, sauf que ce n’est pas notre métier. Travailler avec Waribei fait donc beaucoup de sens”, témoigne Roger, un demi-grossiste client.

L’approche se distingue par son caractère inclusif : aucune garantie ni historique de crédit n’est exigé. La relation préexistante entre le commerçant et son fournisseur suffit comme caution morale.

Un modèle économique pensé pour l’Afrique

Contrairement aux plateformes e-commerce traditionnelles qui se concentrent sur la vente directe aux consommateurs, Waribei a choisi de renforcer le commerce de proximité existant. Cette stratégie répond à une réalité locale forte : en Côte d’Ivoire, 75% des ventes en ligne passent encore par le social commerce sur Facebook, WhatsApp ou Instagram.

Le modèle économique repose sur l’intermédiation financière entre banques partenaires, fournisseurs et commerçants. Waribei se rémunère via des commissions sur les avances accordées, tout en proposant un service gratuit aux utilisateurs de l’application.

Une levée de fonds qui valide le concept

Le tour de table d’octobre 2024, mené par Mstudio (500 000 euros) et Saviu Ventures (250 000 euros), confirme la pertinence du modèle. Mstudio est un startup studio ivoirien spécialisé dans la digitalisation du secteur informel, tandis que Saviu Ventures a déjà soutenu des startups prometteuses comme Anka, Julaya ou Lapaire en Afrique francophone.

Cette validation financière arrive à point nommé pour une entreprise qui ambitionne de s’étendre à l’échelle régionale. Le Sénégal, le Cameroun, le Mali et le Bénin figurent parmi les prochaines cibles, ces marchés présentant des défis similaires en matière d’inclusion financière.

Des défis à relever

Malgré ces perspectives encourageantes, Waribei doit surmonter plusieurs obstacles. La gestion du risque financier constitue l’enjeu principal : octroyer des avances sans garanties nécessite une maîtrise fine des algorithmes d’évaluation de solvabilité.

La concurrence existe également. Des acteurs comme TradeDepot au Nigeria ou Twiga Foods en Afrique de l’Est développent des modèles similaires. Waribei mise sur sa connaissance du terrain et son ancrage local pour maintenir son avantage concurrentiel.

Un impact social significatif

Au-delà de l’innovation technologique, Waribei porte une dimension d’inclusion particulièrement importante. En Afrique, une grande partie des commerçants informels sont des femmes qui peinent encore plus à accéder aux financements traditionnels.

Assétou, propriétaire d’une cave à vin à Abidjan, résume cette transformation : “Waribei me permet de vendre beaucoup plus rapidement. Avant, c’était tellement compliqué de trouver des fonds pour travailler ou des fournisseurs qui me donnent des délais de paiement.”

Vers une révolution du commerce africain ?

Waribei illustre comment l’innovation africaine peut transformer l’économie locale en s’attaquant aux vrais problèmes du terrain. En réconciliant secteur informel et technologies numériques, cette startup ivoirienne trace la voie d’un développement économique plus inclusif.

Si elle réussit son pari d’expansion régionale, Waribei pourrait bien devenir un modèle pour d’autres secteurs et contribuer durablement à la modernisation du tissu économique ouest-africain. Une démonstration que l’avenir du e-commerce en Afrique sera façonné par des solutions pensées localement.


En savoir plus sur businessechos.net

Subscribe to get the latest posts sent to your email.